Service Culturel

(Re)découvrons notre Matrimoine avec la Cie Les Combats ordinaires

Ce mois-ci, l’Université Rennes 2 accueille la compagnie Les Combats ordinaires en résidence de création. Installées au plateau Bourdon, Caroline Alaoui et Lety Pardalis poursuivront le travail commencé autour de leur spectacle Elles, l’autre mémoire avant de le présenter le 29 septembre à 13h à la BU centrale.

Caroline Alaoui et Lety Pardalis
Légende

Caroline Alaoui et Lety Pardalis © Karedwen

Ce spectacle, entre théâtre, chant et conférence, raconte les histoires captivantes de femmes et de filles extraordinaires, de différentes origines et époques, qui ont marqué le monde en tant qu’artistes, scientifiques, journalistes, militantes sans laisser d’empreinte à leur mesure... parce que ce sont des femmes. Une façon de (re)découvrir notre Matrimoine - l’héritage de l'autre moitié de l'humanité !

Ce temps de recherche sera notamment l’occasion pour les comédiennes de compléter leur galerie de personnages qu’elles incarnent avec fantaisie, humour et poésie dans cette conférence théâtrale inspirée par la culture pop. Entretien.

Votre spectacle raconte la vie de femmes extraordinaires de toutes origines et de toutes époques : artistes, scientifiques, inventrices, militantes etc. Pourquoi sont-elles « l’autre mémoire » ? 

La mémoire collective est construite sous le terme « Patrimoine », un mot qui signifie « la mémoire des pères ». De fait, c’est celle qui est très majoritairement honorée dans notre société à travers les paroles portées, les programmes scolaires, les noms de rues, les programmations culturelles, etc.

L'héritage des femmes a été, et reste, invisibilisé. Or, comme le dit justement l’association HF Bretagne :  « En réhabilitant la notion de Matrimoine, le mot comme les femmes qui le composent, nous retrouvons la moitié de notre culture commune ».

La mémoire humaine est composée du Patrimoine et du Matrimoine, sans l’un d’eux, elle est incomplète.

Ce spectacle s'inspire notamment de la série de bandes dessinées Culottées de Pénélope Bagieu. En quoi cet ouvrage a-t-il été un élément déclencheur de votre nouvelle création ?

C’est après avoir lu la bande dessinée Les Culottées de Pénélope Bagieu, et en constatant que les émotions ressenties et les images attachées à ces histoires restaient durablement ancrées dans son esprit, que Caroline a eu l’envie de mettre sur scène des histoires de femmes exceptionnelles. 

Le théâtre est un écrin qui permet le partage vivant de ces histoires. Partage qui se prolonge après le spectacle.

Aborder la condition féminine répond-il à une nécessité ? Aux besoins d’une actualité ? Que peut le théâtre sur ce sujet ?

En tant que femmes, nous avons vécu le manque de modèles qui, enfants, permettent de se projeter dans l'avenir en Grand, et nous vivons, adultes, le fait de devoir prendre et défendre notre juste place.

Nous souhaitons faire découvrir aux filles et aux garçons, aux femmes et aux hommes, la richesse que contient "l'autre moitié de l'humanité". Nous croyons ainsi permettre au public féminin ET masculin de s'y identifier et d'être touché et espérons participer à la lutte pour l'égalité des femmes et des hommes. 
Pour ces raisons, nous voulons jouer dans des lieux divers afin de toucher des publics très différents.

Tous les jours, l’actualité ou nos quotidiens nous rappellent que la condition féminine reste un sujet, souvent glaçant, le plus souvent traité par des hommes.

Raconter des histoires fabuleuses, transcender des sujets sensibles par la poésie, l’humour, les émotions, semer des graines de réflexions, par une expérience partagée et qui se poursuit après le spectacle, c’est ce que permet le théâtre que nous défendons. C’est faire humanité. 

Le faire en tant que femme, c’est partager des récits avec une autre voix.

Sur scène, vous incarnez tour à tour Irena SENDLER, Vanessa NAKATE, Thérèse CLERC ou encore AGNODICE. Toutes des héroïnes, restées invisibles dans l’histoire. Quels sont les principaux défis à relever dans le fait de leur donner corps ? Quel fil rouge guide votre jeu ?

Nous nous sommes demandées comment représenter ces femmes sans les invisibiliser à nouveau en leur donnant notre corps. Nous avons traversé des questionnements intéressants sur les idées de représentation, d’appropriation etc. Ici, notre réponse a été, d’une part, de mettre en valeur la parole contant l’histoire de ces femmes, ce qui a confirmé la forme de la lecture théâtralisée, et, d’autre part, de travailler sur les représentations visuelles de ces femmes, et de toute leur diversité d’âge et d’origine, par le biais de portraits qui composent la scénographie.

Chaque scène commence par la découverte du portrait de l’héroïne. Les pupitres ancrent la forme de la lecture et posent une certaine spatialité.

Chaque histoire a sa forme stylistique propre : conte, jeu télévisé, éloge funéraire, slam…

En plus de chaque héroïne, nous incarnons une galerie de personnages parfois truculents, parfois émouvants, sans autre appui que nos voix et nos corps derrière les pupitres.

Le fait d’être les autrices de nos textes a influé sur notre sentiment de devoir « en faire plus » en tant qu’interprètes, ce qui a provoqué des réflexions passionnantes sur les questions de légitimité en tant qu’artiste, en tant que femme...

L’équilibre entre nos présences d’interprètes enthousiastes, les mots portés et le cadre formel de la lecture est un des enjeux de notre travail avec Frédérique.

En septembre 2022, vous entrez en résidence au plateau Bourdon. Pouvez-vous nous parler de cette nouvelle étape de travail ?

En arrivant à l’université, nous aurons fini d’écrire la seconde série de portraits qui compose notre spectacle modulable (tous les portraits ne sont pas joués à chaque représentation). Nous travaillerons sur ces nouveaux textes pour en affiner l’écriture au plateau. Et nous travaillerons également au choix d’une forme fixe destinée aux plateaux de théâtre. 

Nous sommes particulièrement heureuses de travailler dans ce cadre et avec cette équipe qui œuvre concrètement pour l’égalité des hommes et des femmes.

 

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